Les reines d'Angleterre françaises

L'Angleterre et la France furent longtemps considérés comme des ennemis héréditaires. Et pourtant, au cours du temps, plusieurs Françaises se sont assises sur le trône britannique au côté de leur époux. C'est un détail de l'histoire anglaise peu connu mais aujourd'hui, une dizaine de femmes françaises ont été reines d'Angleterre. Nous vous racontons aujourd'hui leurs histoires aussi rocambolesques qu'elles puissent être.

 

Mathilde de Boulogne (1103-1152), épouse d'Etienne de Blois

Mathilde de Boulogne est apparentée à Charlemagne, aux comtes de Flandre et aux rois d'Ecosse. Cette ascendance illustre explique pourquoi Etienne de Blois la choisit comme épouse en 1125 alors qu'elle devient en même temps comtesse de Boulogne. Etienne convoite le trône de sa cousine Mathilde l'Emperesse lorsque le roi Henri Ier meurt en 1135. Il débarque alors à Londres et se fait reconnaître comme roi par les barons anglais à la place de sa cousine.

Devenue reine d'Angleterre, Mathilde de Boulogne s'implique dans la gestion du royaume en offrant à son époux toutes ses connaissances géopolitiques. De plus, elle bénéficie de relations privilégiées avec de grands nobles du continent.

Mais Mathilde l'Empresse n'a pas dit son dernier mot. Elle lève une armée et part à la conquête de son trône usurpé. Pour la contrer, Mathilde de Boulogne va jusqu'à diriger le siège du château de Douves en 1138. En plus des prétentions de Mathilde, Etienne doit affronter des rébellions écossaises. C'est à son épouse qu'il confie la signature d'un traité en 1139 qui reprend le processus de paix entre les deux nations.

En avril 1141, Etienne est capturé par les forces de Mathildes l'Empresse qui devient la nouvelle reine d'Angleterre. Mathilde de Boulogne reprend les armes et constitue une nouvelle armée pour sauver la cause de son mari. Elle finit par attirer la faveur des Londoniens qui chassent Mathilde l'Empresse en faveur d'Etienne. 

Pour consolider le pouvoir d'Etienne, elle obtient du pape l'autorisation de couronner du vivant de son époux son fils Eustache qui meurt en 1153. Mathilde de Boulogne consacre les dernières années de sa vie à la vie religieuse. Elle rend son dernier souffle en avril 1152 en Essex.

 

Aliénor d'Aquitaine (1122-1204), épouse de Henri II

Née vers 1122, Aliénor hérite de la couronne ducale de son père en août 1137, un mois après avoir épousé le futur roi Louis VII de France. Alors qu'ils remontent ensemble vers Paris, ils apprennent la mort de Louis VI. Aliénor est couronnée reine de France à la Noël 1137 à Bourges.

La beauté, l'intelligence et l'esprit libre de la jeune reine étonnent la cour de France. Très rapidement critiquée pour sa conduite et ses tenues exubérantes, Aliénor amène malgré tout avec elle la culture angevine qu'on lui a enseignée à la cour ducale de Poitiers. Les deux esprits des époux s'opposent en tout point. Flamboyante, Aliénor ne comprend pas le caractère renfermé et songeur de Louis VII, lui qui était d'abord destiné à un service dans les ordres. Plus moine que roi, Louis VII respecte à la lettre les règles de l'Eglise ce qui les empêche d'avoir des enfants pendant près de dix ans. Finalement, Aliénor donne naissance à une fille en 1145. Mais la loi salique l'empêche de devenir l'héritière de la couronne. C'est une immense déception pour Louis VII qui décide de partir en croisade quelques mois plus tard.

Non découragée, Aliénor part le rejoindre. Mais cette épopée va davantage diviser les deux époux. Quand Aliénor est fascinée par l'Orient, Louis VII la réfute et s'enferme dans une piété encore plus austère. L'infidélité supposée d'Aliénor avec son oncle Raymond de Poitiers vient mettre un point final à leur séparation. Ils rentrent séparément en France en 1149. A peine rentrée, Aliénor demande l'autorisation du pape d'annuler son mariage pour consanguinité. Sa demande lui est accordée en mars 1152. Aliénor reprend ainsi son duché avec elle et devient la célibataire la plus riche et la plus convoitée de son époque.

Elle rentre à Poitiers et manque par deux fois de se faire enlever en chemin. Elle commence alors une relation épistolaire avec un jeune noble anglais du nom de Henri Plantagenêt qu'elle avait rencontré à la cour française quelques mois auparavant. Seulement huit semaines après l'annulation de son mariage, Aliénor épouse Henri à Poitiers. Une dizaine d'années les sépare, mais les deux êtres se ressemblent en de nombreux points. Aussi fougueux l'un comme l'autre, ils aiment la vie et sont animés d'une réelle ambition.

Henri et Aliénor sont finalement couronnés roi et reine d'Angleterre en décembre 1154. Ainsi s'achève la guerre civile qui anime l'Angleterre depuis 1135. Ensemble, ils forment un vaste empire qui s'étend du nord de l'Angleterre aux Pyrénées. Les deux époux se plaisent au point de donner naissance à huit enfants à partir de 1153. Les deux premières années du règne sont marquées par l'affirmation de l'autorité d'Aliénor avant que Henri II prenne le dessus. Elle le suit lors de ses voyages et le représente à de nombreuses reprises. Mécène, Aliénor met l'art au centre de ses attentions en commandant par exemple une nouvelle cathédrale pour Poitiers.

Henri II voulait régner seul. Mais ses fils grandissants, ils souhaiteraient avoir un véritable rôle dans la gouvernance de l'empire. Si Henri II fait couronner de son vivant son fils Henri le Jeune pour légitimer sa couronne, il ne lui accorde aucune miette de son pouvoir. Soutenus par Louis VII et le roi d'Ecosse, Henri le Jeune et ses frères Richard et Geoffroy se révoltent contre leur père en 1173. Mais l'arrestation et l'emprisonnement d'Aliénor pendant près de quinze ans mettent fin aux prétentions des trois frères.

En 1183, Henri le Jeune se révolte à nouveau, soutenu par Geoffroy et le roi Philippe Auguste, mais il meurt la même année de dysenterie. La révolte est alors reprise par Richard qui demande la libération de sa mère mais Henri II refuse. En pleine guerre contre Richard, Henri II meurt en 1189. Aussitôt devenu roi, Richard Coeur de Lion libère sa mère. Il part ensuite en croisade et laisse l'empire à sa mère qu'elle gouverne en son nom. Elle finit par le rejoindre avec son épouse Bérangère de Navarre. Mais Jean Sans Terre profite de leur absence pour tenter de récupérer le trône. Aliénor part précipitamment pour l'Angleterre pour mater la rébellion de son fils. Sur le chemin du retour, Richard est capturé en Autriche. Aliénor met tout l'empire à contribution pour payer la rançon demandée.

Richard est tué au château de Châlus en 1199. Aliénor prend aussitôt le parti de son fils Jean alors que le comte de Bretagne faisait valoir ses droits. Elle se retire ensuite à l'abbaye de Fontevraud où son époux a été inhumé. Elle meurt finalement en 1204 à Poitiers à l'âge vénérable de 82 ans.

 

Marguerite de France (1158-1197), épouse de Henri le Jeune

Après l'annulation de son mariage avec Aliénor d'Aquitaine, Louis VII épouse Constance de Castille en 1154. Avec elle, le roi a deux filles dont la première est prénommée Marguerite et naît en 1158. Louis VII doit affronter les prétentions de Henri II Plantagenêt qui ne cesse d'attaquer le territoire français. Les deux monarques se réconcilient en 1158 avec la promesse d'un mariage entre Henri le Jeune et Marguerite de France.

Malgré le retour de la guerre entre Henri II et Louis VII, le mariage a finalement lieu. Marguerite n'a que 2 ans, Henri en a 5, lorsque le mariage est officiellement célébré le 2 novembre 1160 à Neubourg. Pour Henri II, il s'agissait surtout de récupérer la dot de sa belle-fille : le Vexin normand.

Pour consolider sa couronne, Henri II fait couronner Henri le Jeune en 1170. Deux rois d'Angleterre sont alors conjointement assis sur le trône. Mais pour l'heure, il n'y a qu'une seule reine d'Angleterre : Aliénor d'Aquitaine. Louis VII insiste pour que sa fille soit également couronnée. Henri II accepte finalement. Marguerite est couronnée reine d'Angleterre en la cathédrale de Winchester en août 1172.

Le couple a un enfant en 1177 qu'il prénomme Guillaume. Mais l'enfant survit que quelques mois. Henri le Jeune meurt de dysenterie en 1183 alors qu'il se révoltait contre son père. Marguerite n'a pas le choix, elle doit retourner en France. Elle se remarie alors trois ans plus tard avec Béla III, roi de Hongrie, veuf d'Agnès d'Antioche. Béla s'engage dans la troisième croisade. Marguerite rejoint son époux en Terre Sainte avant qu'il y décède en 1196. Marguerite rend son dernier souffle à son tour à Saint-Jean-d'Acre un an plus tard sans jamais avoir donné d'enfants à son second époux. Elle est inhumée dans la cathédrale de Tyr au Lyban.

 

Isabelle d'Angoulême (1188-1246), épouse de Jean Sans Terre

Isabelle n’est rien d’autre que la fille unique du comte d’Angoulême et une petite-fille du roi de France Louis VI le Gros. En 1199, son père la promet au seigneur de Lusignan Hugues IX le Brun qui reçoit la même année le comte de la Marche des mains du roi d’Angleterre Jean Sans Terre. Avec ce mariage, Hugues IX le Brun est sur le point d’obtenir le contrôle d’un territoire stratégique situé entre Bordeaux et Poitiers. Jean Sans Terre comprend très vite qu’avec ce mariage, le seigneur de la Marche pourrait être un véritable danger envers son pouvoir sur le continent. Il fait enlever Isabelle et l’épouse à Angoulême pour garantir la présence anglaise dans la région.

Après être passés par Chinon, Jean et Isabelle rentrent en Angleterre. La nouvelle reine est alors couronnée en l’abbaye de Westminster le 8 octobre 1200. Ce mariage galvanise les foudres des Lusignan qui se soulèvent contre les Anglais avec l’aide du roi de France Philippe Auguste. Le roi Capétien lance ses armées sur les possessions anglaises en 1204 et reprend la Normandie, le Maine, la Touraine, l’Anjou et le Poitou. En somme, leur union sonne la fin de l’Empire Plantagenêt. Elle donne naissance à cinq enfants qui atteignent l’âge adulte. Avec sa descendance, la Maison Plantagenêt est assurée de régner sur l’Angleterre pendant plusieurs années. Alors que des barons se soulèvent contre le pouvoir de Jean Sans Terre, Isabelle se réfugie dans l’ouest du royaume. Jean Sans Terre meurt en 1216 quelques mois après avoir signé la Magna Carta.

Son fils Henri III l’écarte du conseil royal. Elle part alors en France pour reprendre en main son comté d’Angoulême. Elle épouse finalement en 1220 le fils de son ancien prétendant, Hugues X de Lusignan. Avec son époux, Isabelle se rebelle contre la présence française et anglaise sur le continent. La révolte de 1242 en est l’aboutissement mais elle se solde d’une défaite qui lui fait perdre la majeure partie de ses territoires au profit de la France. Elle se retire finalement à l’abbaye de Fontevraud en 1243 où elle meurt trois ans plus tard. Elle est alors inhumée auprès de Henri II, Aliénor d’Aquitaine et Richard Cœur de Lion.

 

Eléonore de Provence (1223-1291), épouse de Henri III

Née vers 1223, Eléonore est la fille du comte de Provence Raimond-Béranger IV. La sœur de l’épouse de Saint Louis est promise au roi Henri III d’Angleterre qu’elle épouse en 1236. Lorsqu’elle arrive en Angleterre, elle emmène avec elle ses proches savoyards comme son oncle l’évêque Guillaume de Savoie qui entre au conseil royal ou son frère Boniface qui devient archevêque de Canterbury. Naît alors des tensions au sein de la maison royale avec la jalousie des barons anglais.

Eléonore devient une femme politique influente en son royaume au point que Henri III lui fait confiance en 1253 pour régenter le royaume quand il part combattre en Gascogne. Elle part aussi à Bordeaux en 1265 pour signer au nom de son époux la charte de coutumes qui garantissait aux habitants des droits et avantages.

Particulièrement éprise de son époux, elle lui donne neuf enfants qui assurent la succession au trône de la Maison Plantagenêt. Henri III meurt en 1272. Eléonore se retire alors à l’abbaye d’Amesbury où elle rend son dernier souffle en 1291.

 

Marguerite de France (1279-1318), épouse d'Edward Ier

Edward Ier est en guerre contre la France de Philippe le Bel depuis cinq ans lorsqu’il signe le traité de Montreuil-sur-Mer. Ce traité franco-anglais signe une paix toute relative entre les deux royaumes. Pour sceller cette paix, Edward Ier accepte d’épouser la sœur de Philippe le Bel, Marguerite. Voilà neuf ans que le roi d’Angleterre est veuf d’Eléonore de Castille lorsqu’il épouse Marguerite le 9 septembre 1299 en la cathédrale de Canterbury. Pour son mariage, Marguerite reçoit également le titre de duchesse d’Aquitaine des mains de son frère.

Marguerite donne trois enfants au vieux roi qui est en train de mater une nouvelle rébellion écossaise menée par Robert Bruce. Mais Robert Bruce se fait couronner roi d’Ecosse en 1306. Alors qu’il part soutenir ses troupes en Ecosse en février 1307, il est touché par la dysenterie qui l’emporte quelques mois plus tard. Devenue veuve, Marguerite reste auprès de son fils devenu Edward II avant de mourir en 1318.

 

Isabelle de France(1292-1358), épouse d'Edward II

Le traité de Montreuil-sur-Mer signé en 1299 prévoyait également le mariage d’Isabelle de France, fille unique de Philippe IV le Bel, avec le prince de Galles Edward. Ce dernier monte sur le trône sous le nom d’Edward II en 1307. Isabelle est alors couronnée reine d’Angleterre. Connue pour sa beauté, elle est aussi une femme intelligente douée en politique et en diplomatie.

Dans les premières années de son mariage, elle soutient son mari pour assoir par la même occasion son autorité à la cour Saint-James. Isabelle est ambitieuse. Elle déteste le favori d’Edward II, Pierre Gaveston, qu’il couvre de privilèges. Une relation homosexuelle entre le roi et son favori reste supposée. Gaveston attire la jalousie des barons anglais qui finissent par l’assassiner en 1312. Edward II choisit comme nouveau favori Hugues le Despenser qu’il charge de venger la mort de Gaveston. En 1322, une forte répression naît dans le royaume en représailles de la mort de Gaveston. Isabelle supporte encore moins la présence de Despenser. Le couple royal est au bord de la rupture.

Elle débute une relation adultérine avec Roger Mortimer, baron de Wigmore. Les deux protagonistes sont aussi ambitieux l’un que l’autre. Ils entreprennent de déposer Edward II et de se débarrasser de la famille Despenser. En 1326, elle rassemble une armée de mercenaires qui se porte victorieuse contre l’armée royale. Elle dépose Edward II et se proclame régente au nom de son fils aîné qui devient Edward III. Son époux est emprisonné au château de Berkeley où il est assassiné, certainement sur ordre d’Isabelle.

En tant que régente, Isabelle est fortement critiquée. Elle dépense sans compter et gouverne d’une main de fer. En 1330, Edward III prend le pouvoir et fait exécuter Mortimer. Isabelle n’est ni emprisonnée, ni exécutée, mais elle est écartée du pouvoir. Gardée loin de la cour, Edward III garde néanmoins de la considération pour sa mère. Cette femme qui fut belle mais cruelle et manipulatrice rend son dernier souffle en 1358.

 

Isabelle de Valois (1389-1409), épouse de Richard II

Deuxième fille du roi Charles VI de France et Isabeaux de Bavière, Isabelle de Valois est néanmoins le premier enfant du couple à atteindre l'âge adulte. En 1394, Richard II d'Angleterre devient veuf d'Anne de Bohême. Le roi anglais est jeune, il n'a que vingt-huit ans. L'Europe entière sait que le monarque cherche à se remarier. Charles VI comprend très tôt l'intérêt d'un mariage de Richard II avec sa fille Isabelle. En pleine guerre de Cent ans, la France et l'Angleterre ont signé une trêve en 1389, mais Charles VI sait que cette trêve est fragile. Il craint aussi que les Anglais ne s'allient à l'Aragon pour reprendre les hostilités. Des négociations de mariage débutent donc dès l'année 1395.

Isabelle n'a alors que six ans lorsqu'elle épouse par procuration Richard II à la Sainte-Chapelle de Paris l'année suivante. Les vingt-trois années qui séparent les deux époux ne les empêchent pas de se marier. Richard II dit alors être capable d'attendre qu'Isabelle soit en âge de procréer. Charles VI et Isabelle se rendent alors dans le Nord du royaume de France pour rencontrer Richard II. Isabelle et Richard s'unissent alors devant Dieu le 31 octobre 1396 à Calais avant de partir pour l'Angleterre.

La jeune reine est couronnée en l'abbaye de Westminster le 8 janvier 1397. Entre Richard et Isabelle, l'amour ne naîtra jamais. Mais bien que ce mariage fut purement politique, un profond respect mutuel a animé leur relation durant toute la durée de leur mariage. Isabelle vit séparée de Richard au château de Windsor, d'abord entourée exclusivement d'une cour française, puis uniquement par des sujets anglais.

Alors que Richard II part en 1398 en Irlande pour mater une rébellion, son cousin Henri Bolingbroke en profite pour lever une armée afin de récupérer la couronne. Les soutiens de Richard II l'abandonnent et se rallient à la cause de Henri. Ce dernier réussit à faire prisonnier Richard II à la Tour de Londres avant de le faire abdiquer en sa faveur en 1399.

Isabelle est d'abord gardée captive au château de Leeds. Henri IV tente une négociation pour qu'Isabelle épouse son fils aîné mais Charles VI refuse de le reconnaître comme nouveau roi d'Angleterre. Richard II meurt probablement assassiné en 1400 à Pontefract. Charles VI exige alors le retour de sa fille en France. Henri IV finit par accepter en 1401. Isabelle de Valois repart alors pour un nouveau destin français au bras d'un nouvel époux : Charles Ier d'Orléans.

 

Catherine de Valois (1401-1437), épouse de Henri V

Sixième fille et dixième enfant de Charles VI et Isabeau de Bavière, Catherine est aussi la soeur cadette d'Isabelle de Valois. Suite au refus de Charles VI de voir se marier sa fille Isabelle avec le fils aîné de Henri IV, un projet de mariage entre le prince de Galles et une princesse de France n'est pas abandonné pour autant. Henri IV porte son dévolu pour la princesse Catherine mais aucun résultat n'aboutit. Henri IV meurt en 1413. Le nouveau roi Henri V reprend les négociations pour son futur mariage avec Catherine mais ses exigences en contre-partie sont trop grandes pour Charles VI. Le roi refuse une nouvelle fois, ce qui entraîne la reprise de la guerre de Cent Ans. Henri V débarque en France à la tête d'une armée et inflige une cuisante défaite à la France à la bataille d'Azincourt en 1415.

Les Anglais envahissent le royaume de France qui se divise entre deux obédiences. Quand les Bourguignons soutiennent le royaume d'Angleterre, les Armaniacs soutiennent la cause de Charles VI. Isabeau de Bavière, frustrée d'être mise de côté dans la gouvernance du royaume de France, embrasse la cause bourguignonne. Elle entame alors de nouvelles négociations avec Henri V pour qu'il épouse sa fille Catherine. Ces négociations aboutissent au traité de Troyes signé en 1420 entre Henri V et Isabeau de Bavière au nom de Charles VI qui prive le dauphin Charles de ses droits sur le trône pour offrir l'hérédité et la régence de la couronne française à Henri V à condition qu'il épouse Catherine.

Le mariage est célébré sans plus attendre le 2 juin 1420 à Troyes. Ensemble, le couple prend les armes contre le dauphin Charles. Aux côtés de Charles VI et Isabeau de Bavière, le couple royal anglais entre triomphalement à Paris le premier décembre 1420. Ils fêtent Noël en grande pompe au palais du Louvre avant de retourner en Angleterre pour couronner Catherine reine d'Angleterre. Fier de son épouse, Henri V la présente à tous les Anglais en entamant une tournée dans le nord de l'Angleterre. Il retourne ensuite en France continuer son combat contre le dauphin Charles.

Le 6 décembre 1421, Catherine accouche au château de Windsor d'un garçon. Henri V requiert ensuite sa présence en France. Elle arrive donc seule à Vincennes en mai 1422 où elle retrouve ses parents et son époux. Après quelques festivités, le couple royal anglais part organiser le siège de Meaux. Henri V souffre alors de dysentrie. Il rentre donc agoniser à Vincennes et rend son dernier souffle en août 1422.

Henri VI devient le nouveau roi d'Angleterre. Le 22 octobre suivant, Charles VI meurt à son tour. Selon les termes du traité de Troyes, Henri VI devient le nouveau roi de France. Mais ce n'est pas du goût des Armaniac et du dauphin réfugié à Bourges et s'autoproclame roi de France sous le nom de Charles VII. Pendant la minorité de son fils, Catherine est écartée de la régence au profit du duc de Bedford et du duc de Gloucester. Elle reste néanmoins une personnalité influente mais sulfureuse. 

Catherine se remarie alors secrètement à Owen Tudor en 1428 malgré l'interdiction des régents. Ecartée de la cour de son fils, elle se retire auprès de son nouvel époux à qui elle donne trois enfants, dont le père du futur roi Henri VII. Elle meurt en 1437 à l'abbaye de Bermondsey à Londres où elle s'était retirée.

 

Marguerite d'Anjou (1430-1482), épouse de Henri VI

Marguerite d'Anjou était la fille de René d'Anjou qui fut entre autre roi de Naples et duc d'Anjou et de Lorraine, et la nièce du roi Charles VII. En 1445, en vue de signer une paix avec la France, elle épouse le roi Henri VI par procuration à Nancy. 

Marguerite donne naissance à un fils en 1453. En digne petit-fils de Charles VI, Henri VI est victime de folie. Richard d'York et les comtes de Salisbury et de Warwick écartent Marguerite du pouvoir et se proclament Lord Protecteur en 1454. Marguerite profite du retour des sens du roi pour écarter Richard et reprendre le pouvoir en levant une armée. C'est ainsi que naît la guerre des Deux-Roses entre Lancastre et York. Cette guerre civile dure trente années et ravage l'Angleterre.

Marguerite prend fait et cause pour la couronne de son époux. Elle mène plusieurs raids au nom de Henri VI. Richard meurt en 1460 et laisse la lutte yorkiste à son fils Edward. Ce dernier sort victorieux de l'armée Lancastre au point de pouvoir détrôner Henri VI. Suite à l'accession au trône d'Edward IV, Henri VI et Marguerite s'enfuient en Ecosse en 1462. La lutte continue malgré tout. Henri VI retrouve brièvement sa couronne en 1470, grâce à l'aide politique et militaire de son épouse, mais il est de nouveau détrôné l'année suivante. Marguerite est alors arrêtée et emprisonnée à la Tour de Londres avec son époux qui y meurt probablement assassiné. Son père René obtient l'aide financière de Louis XI pour payer sa rançon et la faire libérer. Elle rejoint alors son père à Aix-en-Provence en 1476. Elle meurt en Ajou six ans plus tard.

 

Henriette-Marie de France (1609-1669), épouse de Charles Ier

Nous sommes le 11 mai 1625. Henriette-Marie, fille de Henri IV et de Marie de Médicis, est mariée par procuration au tout jeune roi Charles Ier devant les portes de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Pour représenter le monarque, son favori le duc de Buckingham a fait le déplacement en France. Voilà seulement deux mois que Charles Ier a succédé à son père Jacques Ier qui avait négocié son union avec cette princesse catholique française. La raison d'Etat a permis ce mariage. Jacques Ier voulait pour son héritier une union qui permettrait de s'opposer davantage aux Habsbourg. Pour les Français, il s'agissait de signer un accord avec les Anglais pour les aider à combattre les huguenots qui se sont installés à La Rochelle. C'est donc dans un contexte de guerre de religion que Louis XIII offre la main de sa sœur cadette à Charles Ier. Mais ce mariage ne fait pas le bonheur de toutes les classes dirigeantes des deux pays. En France, des nobles s'offusquent lorsqu'ils apprennent qu'une princesse de France va s'unir à un protestant en pleine guerre de religion. En Angleterre, le Parlement tente en vain de s'opposer à ce mariage, craignant que le roi ne soit trop indulgent avec les catholiques anglais à l'avenir. Une seconde cérémonie a lieu le 13 juin suivant à Canterbury avec la présence des deux époux.

C'est ainsi que la jeune fille du bon roi Henri est couronnée reine d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande en l'abbaye de Westminster le 2 février 1626. Henriette-Marie doit cohabiter dans son ménage avec le favori de son époux. Si la véritable nature de sa relation avec Charles Ier reste un mystère, le duc de Buckingham exerce une réelle influence politique sur le roi. Le favori va jusqu'à éloigner la reine de Charles Ier. Il faut attendre l'assassinat du duc en 1628 pour que Henriette-Marie se rapproche de son époux.

Ce rapprochement permet de donner naissance à neuf enfants entre 1629 et 1644. Au cours du temps, la reine acquiert de plus en plus d'influence sur le roi. Elle le pousse ainsi à imposer une politique autoritaire et centralisatrice à la française, tout en permettant une certaine forme de tolérance envers les catholiques. La reine est pueuse et entend offrir une nouvelle place dans la société aux catholiques d'Angleterre. Henriette-Marie devient donc de plus en plus impopulaire. Les puritains craignent qu'elle fasse disparaître le protestantisme en Grande-Bretagne au profit du catholicisme.

En 1642, alors que la guerre civile ravage les Îles britanniques, Henriette-Marie accompagne sa fille Marie aux Provinces-Unies pour qu'elle épouse Guillaume d'Orange. Elle en profite pour lever une armée gagnée à la cause royale et de lever des fonds. Elle arrive à retrouver le roi qui s'est réfugié à Oxford en février 1643. Enceinte, la reine se retire à Exeter pour donner naissance à une fille alors que Charles divise ses effectifs et va de défaites en défaites.

Le Parlement met la tête de la souveraine à prix. Henriette-Marie fuit en France juste après son accouchement. Elle retrouve sa famille française à Paris en juillet 1644. Mais à cette date, Louis XIII est décédé. Marie de Médicis est régente depuis déjà une année alors que son fils Louis XIV n'a que 6 ans. C'est au Louvre qu'elle apprend la décapitation de Charles Ier après un jugement sommaire en 1649. Elle termine l'éducation de ses enfants dans la confession catholique et marie sa dernière fille avec Monsieur frère du roi.

Lorsque la restauration de la monarchie anglaise est proclamée en 1660 à la suite du protectorat d'Oliver Cromwell, Henriette-Marie retourne en Angleterre. Grâce à sa bonté, elle reconquit le cœur des Anglais. Mais à cause de sa santé fragile, elle retourne vivre en France où elle meurt en 1669, au château de Colombes près de Paris.