Napoléon et le Régent, la grâce manquée

« Altesse Royale, en but aux factions qui divisent mon pays et à l’inimité des plus grandes puissances de l’Europe, j’ai terminé ma carrière politique et je viens comme Thémistocle m’asseoir sur le foyer du peuple Britannique. Je me mets sous la protection de ses lois que je réclame de Votre Altesse Royale comme au plus puissant, au plus puissant, au plus constant et au plus généreux de mes ennemis.

Napoléon »

Lettre de Napoléon Bonaparte au Prince-Régent, futur roi George IV du Royaume-Uni, rédigée à Rochefort le 13 juillet 1815.

Le 13 juillet 1815, Napoléon est désespéré. Depuis sa défaite de Waterloo un mois plus tôt, le règne de l’empereur conquérant a pris fin. Il a même dû abdiquer le 22 juin avant de partir incognito pour Rochefort. L’ancien empereur a pour projet de partir refaire sa vie aux Etats-Unis. Mais les Britanniques n’ont pas l’attention de le laisser partir si facilement après avoir ébranlé l’Europe. Ils lui barrent la route et l’obligent ainsi à négocier.

Napoléon n’a plus qu’un espoir : que le prince de Galles, alors régent du Royaume-Uni, lui accorde l’asile. C’est ainsi qu’il prend sa plume et rédige ces quelques mots à l’attention de l’héritier de George III. Le futur roi George IV reçoit bien cette lettre pleine de pitié mais sa réponse restera muette. Finalement, le prince-régent le conduit à bord du Bellérophon en tant que prisonnier. Au moment où le « général Bonaparte » – comme aimaient l’appeler les Britanniques pour mieux le dénigrer – posa les pieds sur le navire, il apprend que l’humide et lointaine île de Sainte-Hélène deviendra son tombeau.

George IV accède au trône en 1820 alors que Napoléon vit dans des conditions de plus en plus drastiques sur cette île oubliée du Pacifique. L’empereur déchu rend finalement son dernier souffle le 5 mai 1821. Le nouveau souverain britannique sort grandit de l’épopée napoléonienne. Il se considère comme le grand vainqueur du « petit caporal » et ne tarde pas à le montrer aux yeux du monde.

A partir de 1824, il fait rénover le château de Windsor par l’architecte Jeffry Wyattville et lui commande la salle de Waterloo. Entièrement dédiée à cette si marquante victoire contre Napoléon, cette vaste salle de réception comporte une dizaine de portraits réalisés par Thomas Lawrence qui représentent les hommes d’Etat et généraux alliés à l’Angleterre contre la France impériale.

Aujourd’hui, l’image de l’Angleterre vainqueur de Napoléon reste plus que jamais présente outre-Manche. Trafalgar Square à Londres est nommé en référence à la célèbre bataille navale dirigée par Nelson, qui est fièrement représenté au-dessus d’une colonne. Une gare et une station de métro londoniennes portent aussi le nom de Waterloo. L’arc de triomphe de Wellington a lui aussi été érigé par ordre de George IV à Hyde Park en 1825 pour commémorer les victoires contre Napoléon.