Holyrood House, palais royal d'Ecosse

Lorsque l’on pense à l’Ecosse royale, l’image de Balmoral et ses splendeurs des Highlands nous viennent automatiquement à l’esprit. Et pourtant, Balmoral est seulement une demeure privée de la famille royale. Quel palais officiel est véritablement attaché à la souveraine en terres écossaises ? Le palais de Holyrood abrite bien des trésors et des mystères que j’ai à cœur de vous dévoiler.

 

Holyrood week, la semaine d’Elizabeth II

Nous le savons, Elizabeth II passe traditionnellement tous ses étés dans son cher domaine de Balmoral. La reine aime l’Ecosse. Sa nature sauvage, son climat frais et humide, la beauté de ses paysages attirent la souveraine depuis son enfance. Mais ce que l’on sait moins, c’est qu’il existe aussi en Ecosse un palais officiel attaché à sa fonction de monarque.

Chaque année, elle élit domicile au palais de Holyrood. Situé à l’extrémité de l’artère historique d’Edimbourg, ce palais fait face à son célèbre opposant le château d’Edimbourg. Pendant cette semaine qui débute à la fin du mois de juin pour s’achever au début du mois de juillet, la reine récompense, reçoit et administre. C’est d’ailleurs à Holyrood que la reine a choisi d’accueillir la visite d’Etat du pape Benoît XVI en 2010. Mais avant toute chose, elle donne une garden party dans le parc du palais pour quelques 8 000 invités. Cette tradition de la garden party de Holyrood est née sous le règne de George V qui a vu en ce palais une parfaite demeure familiale.

Vous racontez le palais de Holyrood c’est remonter au cœur du Moyen-Age, en plein XIIe siècle.

 

Quand une abbaye devient palais

Nous sommes en 1128. Le roi David Ier d’Ecosse chasse à Edimbourg. Attaqué par un cerf, il le prend par ses bois pour se défendre jusqu’à ce qu’il s’aperçoive qu’il tient en fait un crucifix avant qu’il ne disparaisse. Aux yeux de David, c’est une évidence. Ce fut un signe de Dieu. En reconnaissance de cette apparition, il décide de fonder une abbaye à l’endroit même où lui est apparu le crucifix.

Cette abbaye devient étroitement liée à la monarchie écossaise. En ces lieux se sont déroulés bien des événements royaux. Baptêmes, mariages et même couronnements ont rythmé la vie de cette abbaye. Quand le roi vient se recueillir à Holyrood, il loge dans une petite demeure voisine. Mais une telle maison n’est pas digne de la condition royale de son illustre convive.

En 1501, Jacques IV fait construire un véritable palais de style gothique pour son épouse Margaret Tudor qui n’est autre que la sœur de Henri VIII d’Angleterre. Margaret devient veuve douze ans plus tard et elle épouse en secondes noces Archibald Douglas, comte d’Angus. Ce dernier mène la vie dure au jeune roi Jacques V qu’il tient en quasi-réclusion. Jacques V veut se venger et étend sa haine à toute la famille du comte d’Angus. En 1537, il accuse de haute trahison sa belle-sœur lady Glamis, une aïeule de Queen Mum, et la fait brûler vive sur l’esplanade du château. Ainsi débute les heures sombres de Holyrood.

 

Marie Stuart à Holyrood

Holyrood devient la résidence principale des rois d’Ecosse. Jacques V épouse Marie de Guise en 1538, qui donne naissance à une fille unique quatre ans plus tard. Marie Stuart succède à son père à peine cinq jours après sa naissance. Après une vie tumultueuse en France, elle revient en Ecosse en 1560 en étant veuve du roi François II. Débute alors le règne tourmenté de Marie Stuart. Elle épouse son cousin Lord Darnley, un homme beau et charmant mais violent et alcoolique.

Marie est enceinte de sept mois du futur Jacques VI quand elle commence à être usée des infidélités de son époux. Elle se console entourée de ses amis chanteurs dont son secrétaire privé David Rizzio, un aristocrate piémontais, demeure son plus proche courtisan. Lord Darnley ne peut plus supporter la présence de Rizzio. Le 9 mars 1556, il s’introduit à Holyrood et entre dans la salle à manger où Marie dîne en compagnie de ses favoris. Il traîne Rizzio dans la salle d’audience et le poignarde de cinquante-six coups de couteaux sous le regard horrifié de la souveraine. Le corps de Rizzio reste neuf jours sur le sol, ce qui laisse une trace indélébile sur les dalles.

Un an plus tard, Darnley meurt à son tour assassiné, probablement étouffé dans les jardins de Holyrood par James Hepburn qui devient le troisième époux de Marie. Face à toute cette brutalité et ces contestations, Marie Stuart est forcée d’abdiquer en faveur de son fils d’un an qui devient Jacques VI. Cherchant secours auprès de sa cousine Elizabeth Ire, elle la met en résidence surveillée pendant dix-huit ans avant d’être décapitée sur ordre de cette dernière. On dit que le fantôme de Marie continue à hanter ses appartements de Holyrood.

 

Holyrood face à Cromwell

En 1603, Jacques VI devient Jacques Ier d’Angleterre. Il abandonne alors Holyrood pour s’établir à Londres et régner sur ses deux royaumes, même s’il y retourne une dernière fois en 1617. Seul Charles Ier retourne à Holyrood pour se faire couronner roi d’Ecosse en 1625. Mais vingt-quatre ans plus tard, Charles Ier est décapité au profit d’une république puis d’un protectorat dictatorial. Mené par Oliver Cromwell, le nouveau régime détonne. Cromwell veut effacer toutes traces de l’ancien régime. Il détruit les joyaux de la Couronne et se tourne ensuite vers Holyrood, le symbole écossais de la monarchie. Il fait brûler le palais avant de le délaisser.

Mais le protectorat est éphémère. En 1660, Charles II Stuart revient avec force et entreprend de rétablir les symboles détruits de la monarchie. Il fait reconstruire le palais de Holyrood entre 1671 et 1679 par Sir William Bruce. Un palais classique, reprenant ses bases médiévales, sort de terre. Une cour carrée devient le centre du palais autour duquel s’organise des appartements privés et des appartements d’Etat.

 

Après l’oubli, le renouveau de Holyrood

En 1707, les couronnes d’Angleterre et d’Ecosse sont officiellement réunies. La Grande-Bretagne est née. Holyrood tombe rapidement dans l’oubli au profit des palais anglais. George III finit par le désigner comme refuge pour le comte d’Artois, frère de Louis XVI et futur Charles X, qui lui avait demandé son aide pour fuir la Révolution. Charles X y retourne même une seconde fois de 1830 à 1832 après son abdication.

Le refuge écossais des Bourbon retrouve grâce aux yeux de la famille royale. George IV est un grand amoureux de la culture et de l’histoire écossaise. Le destin tragique de Marie Stuart le passionne. Il entreprend en 1824 la restauration du palais. Grâce à lui, les appartements de Marie sont préservés à l’identique. A ses yeux, ces appartements sont sacrés et dignes d’être préservés.

Sa nièce Victoria est aussi une grande amoureuse de l’Ecosse. Avec Albert, elle a bien l’attention de mener une partie de sa vie dans les Highlands. Albert prend les rênes et continue la restauration de Holyrood. C’est ici que Victoria et Albert vivent en Ecosse avec leurs premiers enfants avant d’acheter Balmoral. Grâce à eux, Holyrood entre définitivement dans le nouveau quotidien de la famille royale. Cette résidence familiale retrouve finalement ses lettres de noblesses en devenant de nouveau la résidence officielle du souverain en 1911. George V prend même la décision d’ouvrir une partie du palais au public lorsqu’il n’y est pas dès 1920.

 

L’abbaye de Holyrood est aujourd’hui une magnifique ruine digne des plus grandes œuvres romantiques après que la toiture de l’abbatiale se soit écroulée au XVIIIe siècle. Mais le palais demeure une résidence officielle du souverain britannique méconnue. Pourtant son histoire est loin d’être un long fleuve tranquille. Tour à tour centre névralgique de la monarchie écossaise, grand oublié des Stuart anglais, puis résidence officielle écossaise du monarque, Holyrood est l’un des palais les plus importants de Grande-Bretagne. Théâtre d’actes sanglants, il est aussi celui d’une semaine dans la vie publique d’Elizabeth II. Il en va s’en dire, sans l’amour écossais de George IV et Victoria, Holyrood serait sans doute tombé définitivement dans l’oubli.